Il y a quelques années lorsqu’on exposait dans les musées, une tombe préhistorique dans laquelle on avait trouvé un corps d’homme avec des outils, on trouvait généralement ce commentaire : « les hommes avaient déjà inventé tel ou tel outil ». En revanche, si la tombe recelait un corps de femme, l’affiche stipulait : « les femmes utilisaient ces ustensiles ». Cette différence de traduction se retrouvait dans bien d’autres domaines, notamment ceux des recherches autour des animaux. Par exemple, dans de nombreuses espèces, les mâles étaient intéressés par les conflits et les réglaient souvent par la violence ; les femelles, sans doute mal équipées pour la politique, étaient censées s’adonner à des occupations plus pacifiques.
Le Nouvel Observateur nous apprend que des anthropologues américains viennent de découvrir que des chimpanzés du sud est du Sénégal construisent des armes comme des morceaux de bois affûtés pour chasser leurs proies, des lémurs et des tarsiers. C’est déjà une grande nouvelle. Mais, plus surprenant encore, cette invention serait le fait des femelles, les mâles ne les utilisent pas. On ne peut s’empêcher de penser que quelques décades de lutte féministe ont favorisé ce type de découvertes. Mais on ne doit pas oublier que les animaux, eux aussi, apportent leur contribution au changement des mentalités et qu’ils ne cessent de nous encourager à réviser nos certitudes.
Vinciane Despret, Commissaire scientifique de l'exposition Bêtes et Hommes.
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